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Souvenirs, souvenirs...
Cent ans de chanson française |
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Affiches, pochettes de disques de
la chanson française au cours du XXe siècle…
Un condensé musical à explorer lors d une exposition présentée
à la fin du mois de mai prochain, site François-Mitterrand.
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"La chanson appartient à la mémoire
individuelle et collective. Dans la vie de tout un chacun, légère
ou grave, elle fixe nos émotions les plus intimes en même temps
qu’elle reflète l’évolution de la société",
indiquent Elizabeth Giuliani et Pascal Cordereix, commissaires de l’exposition.
Le parti-pris ? Un découpage du XXe siècle
en dix décennies qui organise un parcours où la chanson se
donne à voir et à entendre à travers le disque, l’affiche,
la photographie ou les médias. Ces documents évoqueront la
scène de la chanson, ses lieux de pratique, ses modes de diffusion.
Ils permettront également de l’aborder comme objet fétiche
à travers les grandes figures de ses interprètes et restitueront
ainsi la chanson comme témoin de son temps.
Le XXe siècle s’ouvre avec l’Exposition
universelle de 1900. Dans les cartons de celle-ci figure le projet d’un
"Palais de la chanson française"qui traduit son importance
dans l’esprit de l’époque. En ce début de siècle,
la chanson française se produit essentiellement dans des caf’conc’
et des cabarets comme Le Chat noir ou Le
Lapin agile, à Montmartre. Cette chanson peut sembler lointaine.
Pourtant, des titres comme Froufrou ou La
Paimpolaise de Théodore Botrel ont marqué la mémoire
collective. De fortes personnalités ont laissé leur empreinte.
Ainsi, Aristide Bruant dont les chansons un rien populistes sont autant
de vignettes de la vie parisienne. Homme d’affaires avisé,
Bruant éditait ses partitions et produisait lui-même ses disques.
Le disque, qu’on écoute sur de superbes phonographes à
pavillon, prend son essor et devient une véritable industrie.
Elle sait conduire une automobile
Avec la première guerre mondiale, la chanson revancharde "anti-boches"
prend une place importante dans le répertoire. C’est une chanson
de "réconfort" qui devient l’hymne des combattants
alliés : La Madelon, qui vient
servir à boire aux poilus. Pour garder le moral au cœur de la
tragédie, les soldats consignent nombre de chansons sur des carnets :
chansons d’amour, bluettes d’avant la guerre, etc. Malgré
la censure, malgré la traque menée par l’État
major, c’est de cette manière que va se propager ce qui reste
le brûlot antimilitariste le plus violent de la guerre, véritable
appel à la mutinerie, La Chanson de Craonne,
recueillie par Paul Vaillant Couturier dont l’auteur reste anonyme.
Après la guerre, la société se transforme en profondeur.
La femme s’émancipe et la chanson s’empare de ce phénomène,
pour s’en moquer gentiment (avec une pointe de jalousie peut-être,
s’agissant d’un répertoire essentiellement masculin) :
en 1924, Dréan chante Elle s’était
fait couper les cheveux. Biscot renchérit en 1927 avec Elle
sait conduire une automobile. Thème récurrent de la chanson
en France : les taxes et impôts : Cach’
ton piano de Maurice Yvain et Willemetz (1920) est l’une des
plus savoureuses chansons de ce répertoire.
Mais les années 20 se caractérisent également par des
progrès technique et par une ouverture au monde. En 1927, le micro
fait son apparition. Parallèlement, Mistinguett avec Paris
qui jazze au Casino de Paris, Joséphine Baker avec "La Revue
nègre" au music hall des Champs Élysées, ou encore
le tango de Carlos Gardel témoignent des influences musicales venues
du continent américain. Maurice Chevalier avec Dans
la vie, faut pas s’en faire en 1921, ou encore les grandes
tragédiennes que sont Damia ou Fréhel, témoignent d’une
certaine permanence du répertoire de la chanson française.
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4 000 titres de Vincent Scotto
Quand on se promène au bord de l’eau
chantée dans le film La Belle
Équipe de Julien Duvivier caractérise à
elle seule l’esprit du Front Populaire de 1936. Mais musicalement
parlant, le bouleversement des années 30 arrivera des États-Unis :
c’est le jazz. Le swing s’impose et impose de nouveaux
artistes qui bousculent les codes : Mireille avec Couchés
dans le foin ou Ce petit chemin,
par Jean Sablon, le plus grand crooner
français, et surtout le "fou chantant", Charles Trenet
qui, de Je chante à La Mer,
va s’imposer comme le plus grand chanteur français du
siècle. Si Trenet mérite ce qualificatif, Vincent Scotto,
lui, est certainement le plus grand compositeur de la chanson française
au XXe siècle. Plus de 4 000 titres
sont dus à sa plume fertile et inventive. Ne prenons que deux
exemples : J’ai deux amours,
immortalisée par Joséphine Baker, et La
Java bleue dans l’interprétation inoubliable de
Fréhel. C’est dans ces mêmes années que
le compositeur Paul Misraki, auteur d’innombrables "tubes",
rencontre Ray Ventura et ses Collégiens. Ils seront à
l’origine de nombreux titres à succès parmi lesquels
Tout va très bien Madame la marquise
ou Ça vaut mieux que d’attraper
la scarlatine. À Paris, l’ABC,
l’Alhambra et le Copacabana
comptent parmi les scènes importantes de la chanson qui consacrent
la carrière d’un chanteur. C’est le parcours que
connaîtra une jeune débutante en 1936 : Édith
Piaf.
Sous l’occupation allemande "le spectacle continue".
Parallèlement, se développent deux registres de chansons
partisanes : pro-Vichy dont Maréchal
nous voilà reste l’archétype. Et, évidemment,
anti-Vichy, dont Londres et la BBC sont le foyer de diffusion :
c’est le cas du Chant des partisans
qu’Anna Marly compose à Londres sur des paroles de Joseph
Kessel et Maurice Druon. Le mouvement zazou, le swing sont autant
de pieds de nez aux forces d’occupation.
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Jacques Canetti, découvreur de
talents
Après la guerre et au cours des Trente Glorieuses, l’industrie
du disque se transforme. Au milieu des années 50, le 78 tours
disparaît au profit du microsillon. Avec 36
chandelles de Jean Nohain, en 1952, la télévision
devient un lieu de spectacle. La TSF laisse la place au transistor
au début des années 60. Dans les années 50,
à Saint-Germain-des-Prés, Boris Vian et Juliette Gréco
symbolisent l’état d’esprit avide de liberté
d’une génération blessée par la guerre.
La chanson qui leur est associée sera par la suite qualifiée
de "chanson Rive gauche". Elle se caractérise par
l’importance accordée au texte, à la poésie
et par le minimalisme de l’accompagnement musical. C’est
l’époque des cabarets comme L’Écluse
ou Les Trois baudets animé par
Jacques Canetti, le découvreur de Georges Brassens, de Jacques
Brel, de Guy Béart et de tant d’autres.
Si Boris Vian et Henri Salvaldor pastichent le rock’n’roll
avec Rock and roll’mops ou Rock
hoquet, celui-ci n’en fait pas moins son apparition en
France avec un premier titre interprété par Danyel Gérard
en 1958 : D’où viens-tu
Billy Boy ?. L’année suivante, Richard Anthony
fait ses débuts avec un titre on ne peut plus prémonitoire :
Nouvelle vague. La vague yéyé
déferle sur la France. Variante édulcorée et
version petit bourgeois du rock américain, elle impose l’image
aseptisée d’une jeunesse insouciante et fleur bleue.
Mai 68 va mettre un terme brutal à cette fiction. La chanson
se radicalise : contestation d’un côté (Léo
Ferré, le père tutélaire, François Béranger,
Maxime Le Forestier…), opium du peuple de l’autre (la
télévision de Guy Lux, Danièle Gilbert…).
C’est sur ce terreau que naît la "nouvelle chanson
française" au milieu des années 70 avec Renaud,
Alain Souchon, Daniel Balavoine, Francis Cabrel…, mêlant
tradition française pour les textes et influences du rock anglo-saxon
pour les musiques. Paradoxe, dans les années 80, la scène
rock redécouvre avant tout le patrimoine de la chanson française :
Les Garçons Bouchers réinterprètent Fréhel,
les Négresses Vertes réintroduisent l’accordéon,
instrument jugé "ringard" jusque là. Autres
précurseurs, Chagrin d’amour, duo sans lendemain mais
qui, dès 1982, annonce le rap à la française
avec Chacun fait ce qui lui plaît.
Le disque devient compact. Le clip vidéo s’impose comme
un moyen incontournable de diffusion de la chanson. Mylène
Farmer, Étienne Daho, les Rita Mitsouko… en font un moyen
d’expression à part entière. Éternel phénix,
la chanson réinvestit des genres que l’on croyait tombés
en désuétude : le succès de comédies
musicales comme Notre-Dame de Paris
ou Les Dix Commandements en sont la
preuve. Autre signe de l’éternelle renaissance de la
chanson française : pendant que la Star Academy surfe
sur la vague de la télé-réalité et du
marketing roi, une génération de chanteurs renouvelle,
encore une fois, le genre. Ils ont pour nom Keren Ann, Benjamin Biolay,
Vincent Delerm, Carla Bruni, etc. replaçant même sur
le devant de la scène de grands "anciens" comme Henri
Salvador ou Juliette Gréco.
Pascal Cordereix, Elisabeth
Giuliani,
avec la collaboration de Florence Groshens |
Un numéro spécial de la Revue
de la BnF, consacré à la chanson française
dans les collections de la BnF, paraîtra courant mai 2004.
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En savoir plus
Souvenirs, souvenirs ...
Cent ans de chanson française
Du 26 mai au 31 décembre 2004
Commissaires : Elizabeth Giuliani et Pascal
Cordereix
Site François-Mitterrand
Petite Galerie – Hall Est
Entrée : 4 €. TR. : 3 € |