Livres en bouche
- Exposition

L’exposition « Livres en bouche », consacrée à l’art culinaire français du Moyen-Âge à la fin de l’ancien Régime, véritable festin de livres rares, voire uniques, va régaler le public à la Bibliothèque de l’Arsenal à partir du 21 novembre.

La Bibliothèque de l’Arsenal nous convie à un retour aux sources du patrimoine culinaire de la France en nous faisant assister aux prémices de la gastronomie, à l’émergence de la « distinction par le goût » et à la naissance du débat alimentaire, qui du XIVe au XVIIIe siècle ont conduit la cuisine française à affirmer sa prééminence sur la cuisine européenne.

Le parcours de l’exposition se situe entre les deux figures emblématiques, que sont le cuisinier Taillevent et le premier critique gastronomique, Grimod de la Reynière.

Les premiers livres de cuisine française remontent au début du XIVe siècle. Ces manuscrits médiévaux sont souvent le fait de prestigieux cuisiniers au service des grands de ce monde. Le plus fameux est le Viandier attribué à Guillaume Tirel, dit Taillevant, maître-queux des rois Charles V et Charles VI. Sorti des presses parisiennes vers 1488, il connaîtra un véritable succès jusqu’au début du XVII e siècle.

A la Renaissance, de nombreux ouvrages, la plupart écrits par des médecins, prolongent le discours alimentaire du Moyen-Age, en laissant entrevoir une évolution des goûts avec l’apparition de légumes et de fruits dans les recettes. A côté du Viandier et du Platyne en français, le grand livre à succès de la seconde moitié du siècle est Le Grand Cuisinier de toute cuisine publié vers 1543. La grande nouveauté de l'édition culinaire au XVIe siècle est constituée par les livres de confitures, dont l’Excellent et moult utile opuscule…du célèbre Nostradamus, paru à Lyon en 1555.

Dans les années 1650, une relance du discours culinaire, marquée par une sensibilité nouvelle à la saveur naturelle, apparaît avec le Cuisinier français de Pierre de La Varenne, emblème du nouveau livre de cuisine.
Succédant aux livres de confiture, les livres d’office se multiplient, consacrés aux préparations qui se font dans un lieu frais : confitures, salade, sirops, thé, café, chocolat, liqueurs.

Au XVIIe siècle, les cuisiniers modernes prônent une cuisine simplifiée fondée sur la recherche du vrai goût. Le livre de cuisine se veut utile à tout le monde. La création en 1767 d’un journal mensuel, le Gazetin du comestible, qui propose la vente par correspondance, témoigne de l’attention portée à la provenance et à la qualité des denrées alimentaires. Avec les Lumières, s’ouvre un discours plus social, posant le problème de la nourriture des riches et de ceux qui sont « soumis au bon vouloir de l’Etat » ou des maîtres, notamment les pauvres. L’adoption de la pomme de terre, pour éviter la disette, est mise à l’honneur dans la Cuisine républicaine .

Le parcours s’achève sur l’éclosion de la littérature gastronomique avec la figure de Grimod de la Reynière. Critique théâtral et littéraire, il se fait connaître à travers les « dîners du mercredi » organisés dans son hôtel des Champs-Elysées de 1782 à 1786, qui ont joué un rôle important dans l’élaboration des règles gastronomiques, qui ont inspiré son Almanach des Gourmands paru à partir de 1803.

Commissaire de l’exposition :
Sabine CORON, conservateur en chef à la Bibliothèque de l’Arsenal

Marie-Noële Darmois

Livres en bouche
Cinq siècles d’art culinaire français
( XIV e - XVIII e siècle)


Bibliothèque de l’Arsenal
1, rue de Sully - 75004 Paris

21 novembre 2001 - 17 février 2002
Du mardi au dimanche de 12 h à 18 h.
Entrée libre

Cette exposition est une manière d’hommage rendu au fondateur de la bibliothèque, Antoine-René de Voyer d’Argenson, marquis de Paulmy. Grand collectionneur et bibliophile du siècle des Lumières, il occupa de 1757 à 1787 une partie de l’ancien hôtel des Grands maîtres de l’artillerie, où il rassembla une bibliothèque encyclopédique de 60 000 volumes. Il y fut l’instigateur en 1776, d’un projet d’une Histoire de la vie privée des Français, dont la première partie, l’Histoire de la nourriture , rédigée à sa demande par Jean-Baptiste Le Grand d’Aussy en 1782 est considérée comme un ouvrage précurseur de « la gastronomie historique ».



L’exposition se déroule dans les lieux même où habitait le marquis de Paulmy de 1757 à 1787. Parmi les livres et le mobilier demeurés sur place depuis le XVIII e siècle, deux tables dressées réalisées sous la direction de Silvano Serventi, historien des pratiques de la table à partir d’ouvrages de référence, évoquent le souvenir des hôtes illustres de l’Arsenal.

Dans le grand salon Sully, une collation du XVIIe siècle, servie en « ambigu » selon un plan de table structuré où plats et couleurs sont mis en symétrie, présente un menu d’hiver de 31 plats sucrés et salés réalisés par le cuisinier Fabrice Doux et la maison Lenôtre.


Dans l’ancienne salle à manger du marquis de Paulmy, une table intime de 4 couverts est dressée au service du dessert, fromages, biscuits, compotes, vins liquoreux…
Cette évocation parmi les magnifiques ouvrages rappelle que si la cuisine peut se goûter dans les livres, c’est autour de la table qu’elle se partage.

Catalogue de l’exposition
Cinq siècles d’art culinaire français
sous la direction de Sabine Coron,
250 pages, 240 F / 36,59 €
Co-édition Hermann -BnF