Auditoriums > « Donner aux jeunes le goût des mathématiques » Confronter les mathématiques, des enjeux de société et un texte : tel est l’objet du cycle de conférences « Un texte, un mathématicien ». Sylvie Méléard, mathématicienne probabiliste enseignant à l’École polytechnique, s’appuiera sur Darwin pour souligner l’importance des mathématiques appliquées. Chroniques : Quel est le sujet de votre intervention à l’intérieur de ce cycle ? Sylvie Méléard : Vulgariser, expliquer les enjeux de nos travaux scientifiques est fondamental. On ne « raconte » pas suffisamment les mathématiques. J’ai répondu à l’invitation de Martin Andler*, qui a initié ces cycles de conférences, avec l’espoir de donner aux jeunes le goût des mathématiques, notamment des mathématiques appliquées, que je pratique. Je développe en effet des « objets » mathématiques qui permettent de modéliser des situations biologiques et écologiques complexes. Ce sont ces modélisations que j’exposerai simplement aux jeunes et aux lycéens qui assisteront à la conférence du 23 janvier. J’ai adossé mon intervention à un texte fameux de Charles Darwin : L’Origine des espèces. Quel lien entre ce naturaliste du XIX e siècle et les mathématiques aujourd’hui ? S. M. : Darwin se targue d’être nul en mathématiques ! Mais il emploie des raisonnements abstraits très rigoureux pour élaborer sa théorie de l’évolution. Il progresse logiquement, par une suite d’assertions, comme Sherlock Holmes dans ses enquêtes. Dans son autobiographie, Charles Darwin loue « l’extrasens » des mathématiciens, ce sixième sens qui permet d’appréhender des problèmes très vastes avec une logique parfaite. J’ai légèrement dérogé à la consigne en choisissant le texte d’un naturaliste plutôt que celui d’un mathématicien. Mais j’entends montrer que Darwin a ouvert deux grandes voies explorées aujourd’hui : la génétique des populations et l’étude de l’interaction entre les êtres vivants et leur milieu. Des outils de modélisation mathématique permettent de mieux les comprendre. Peut-on donner une idée simple de ces outils de modélisation ? S. M. : Oui ! Il est possible de donner les clés de nos travaux de façon accessible et rigoureuse. On peut ainsi dire simplement que les probabilités servent à décrire ce qui se déroule au niveau microscopique, de la cellule et de l’ADN, mais aussi à cerner des dynamiques macroscopiques, à l’échelle des systèmes. Je collabore donc avec des biologistes de l’évolution et des écologues. Pour comprendre le phénomène d’extinction des espèces, par exemple, j’ai travaillé avec un biologiste spécialiste d’une espèce de serpent à sonnette en Arizona. À partir des données qu’il a recueillies, nous avons établi un modèle mathématique qui rend compte de l’écosystème étudié. Comment expliquer le succès de ces conférences et, plus généralement, l’engouement actuel pour les mathématiques ? S. M. : Grâce à ces conférences de vulgarisation, la discipline perd l’aura intimidante qui l’entourait. Le public peut ainsi mesurer l’importance des mathématiques appliquées à des domaines aussi variés que la virologie, l’informatique ou la biodiversité : des enjeux de société primordiaux et passionnants ! Propos recueillis par Cédric Enjalbert * Martin Andler est le président d’Animath (www.animath.fr), association qui œuvre pour la popularisation des mathématiques. BnF, Philosophie, histoire, sciences de l’homme. Un texte, un mathématicien Darwin : le hasard et l’évolution Ci-dessus Chromosomes féminins À gauche Mercredi 23 janvier, 18 h 30-20 h 13 février, 27 mars 2013 Site François Mitterrand, Grand auditorium, hall Est Organisé avec la Société Mathématique de France – En partenariat avec France Culture et Animath Caricature d’André Gill pour la couverture de La Petite Lune, 1878 16 – Chroniques de la BnF – n°65 © BSIP.