Dossier > AC AC Q U IS I T IO N BN IS IO BN F GUY DEBORD L s Editi ©2012 Le t R ne/G Albert Re ons Alber F O S IO N B N A C Q U IS I T Z UDERZO considébl i i l rable et international des biens culturels. Les livres rares ont vu leur prix multiplié par six à huit depuis dix ans. Les manuscrits enluminés de qualité sont rarement vendus en deçà d’un million d’euros. La presse ne manque pas de se faire l’écho des surprenants sommets atteints par la vente de pièces considérées il y a encore vingt ans comme de moindre valeur. En 2011, une marine de Le Gray, ce photographe fi nalement peu connu du xixe siècle, a atteint près d’un million d’euros en vente publique à Paris. En 2010, pour prendre un exemple bien plus humble et plus radical encore, un exemplaire du numéro 1 d’Action comics (1938) où apparaît pour la première fois Superman – et qui coûtait 10 cents à l’époque – s’est arraché un million de dollars aux ÉtatsUnis. Cet enchérissement explique pour une large part le recours de plus en plus fréquent au mécénat, dans un contexte économique où l’État resserre partout sa contribution à la culture. Il est devenu vital d’y recourir, sous peine de voir des œuvres patrimoniales rares et précieuses sortir du territoire et ou devenir plus ou moins inaccessibles à la consultation. La plupart des grandes entrées récentes de la Bibliothèque ont ainsi bénéficié de la générosité de particuliers ou d’entreprises mécènes : les manuscrits de Casanova, les archives de Guy Debord, celles de Michel Foucault, mais aussi des manuscrits enluminés très rares tels la Vie de sainte Catherine d’Alexandrie ou, tout récemment, Le Livre d’heures de Jeanne de France, pour lequel le mécénat a été complété par une 22 – Chroniques de la BnF – n°65 sou souscription publique qui a connu un grand succès. À ces deux défis généraux, la BnF en a ajouté un troisième, qui l’eng gage encore plus directement. L Longtemps elle a eu la réputation d de ne s’intéresser qu’aux genres l les plus « nobles », aux artistes les plus « classiques »… Ce temps paraît révolu. Sous l’impulsion de conservateurs résolument de leur temps, la BnF a élargi ses champs d’intérêt et s’attache désormais à rendre com compte de la création contempoi raine dans ses nombreuses facettes et avec une plus grande réactivité. C’est le sens profond de nombreuses entrées récentes : la BnF a accueilli les archives de René Girard, Claude L év i-Strauss, Roland Bar t hes, Julien Gracq, Jean Malaurie, René Rémond, mais aussi celles de Noëlle Châtelet, Hélène Cixous, Annie Ernaux ou Olivier Rolin, sans oublier des auteurs de romans policiers ou de science-fiction, tels JeanPatrick Manchette ou Pierre Boulle, de la grande chorégraphe Carolyn Carlson, des dessinateurs Albert Uderzo, Georges Wolinski… et bien d’autres projets sont en cours. Approche culturelle décloisonnée qui s’intéresse à toutes les formes de création comme à la vie intellectuelle dans son ensemble, positionnement au diapason de la société contemporaine, c’est la BnF d’aujourd’hui dans la société d’aujourd’hui. Un pacte de confiance Un tel article ne voudrait cependant pas donner l’idée d’un monde culturel de plus en plus marchand ou concurrentiel. Si des défi s contemporains s’imposent, s’affi rment aussi des traditions et d’abord celle de la grande générosité des créateurs à l’égard des collections publiques. Elle passe par une grande confi ance dans l’État, et notamment la BnF, qui garantit tout à la fois continuité, indépendance, rigueur, accessibilité des œuvres aux chercheurs, respect du droit et, en premier lieu, celui des créateurs. De ce pacte de confi ance avec une institution il faut dire aussi la dimension humaine… Entre les créateurs ou leurs ayants droit et les e er z derzo i o cinny-Ud oscinny-U En haut à gauche Astérix chez les Belges, case de la planche originale 1B à droite Papillon « Si vous vous croyez du génie… » Internationale Lettriste Décembre 1955 Ci-dessous Roland Barthes, projet de maquette pour la couverture de Roland Barthes par Roland Barthes, dessin, 1974. représentants de la BnF (président, direction générale, conser vateurs…) se noue une relation privilégiée, toujours marquée par un grand respect mutuel et souvent beaucoup d’amitié. Un auteur qui travaille en collaboration avec un conservateur en charge de « son » fonds, sait qu’il peut s’appuyer sur une compétence soucieuse de s’exercer avec rigueur, engagement, et imagination aussi, pour ce qui concerne la conception d’expositions, de colloques, de travaux de recherche ou toute autre action de valorisation. On en donne ici un des meilleurs exemples avec le lien intellectuel tissé entre Pierre Guyotat et le conservateur en charge de ses archives au département des Manuscrits, Guillaume Fau [lire page ci-contre]. BnF, Manuscrits Denis Bruckmann & Sylvie Lisiecki NF I I S IO N B A C Q U IS I T THES ROLAND BAR