Expositions > Salah Stétié, un passeur des deux rives Figure majeure de la poésie contemporaine, Salah Stétié a confié à la BnF un important ensemble de manuscrits, d’éditions originales, de livres d’artistes, d’œuvres sur papier d’amis plasticiens, de lettres et de photographies. Une exposition en forme d’hommage lui est consacrée dans la galerie des Donateurs. Yves Bonnefoy et André du Bouchet. Directeur de L’Orient littéraire et culturel, supplément de L’Orient, il entre dans la carrière diplomatique dans les années 1960. Conseiller culturel du Liban à Paris, puis délégué permanent du Liban à l’Unesco, il est nommé ambassadeur du Liban aux Pays-Bas en 1982 puis au Maroc en 1984, avant de devenir secrétaire général du ministère des Affaires étrangères à Beyrouth, en pleine guerre civile. Parallèlement à la diplomatie, Stétié écrit des poèmes en français, « langue d’invention », dont le premier recueil, L’Eau froide gardée, publié chez Gallimard en 1973, sera aussitôt remarqué. La synthèse de deux cultures Salah Stétié a reçu le Grand Prix de la francophonie décerné par l’Académie française en 1995. Son œuvre, composée pour la plus grande partie d’essais et de poèmes, ne cesse de faire dialoguer les deux pays, les deux cultures dont il est la synthèse. Ses essais portent à la fois sur les grandes figures poétiques françaises (Rimbaud, Baudelaire, Mallarmé, entre autres) et sur la civilisation arabo-islamique dont il est issu et qu’en passeur passionné il tente de faire connaître. Son premier essai, Les Porteurs de feu (Gallimard, 1972), est ainsi un hommage à divers grands poètes arabes. Sa poésie, mystique et sensuelle, chante la nature et la femme, par des arabesques et des oxymores. Pour Salah Stétié comme pour René Char ou Yves Bonnefoy dont il se sent proche, la poésie a une visée ontologique. Son œuvre inspire un grand nombre de peintres contemporains de nationalités et de styles variés, tels Pierre Alechinsky, Antoni Tàpies, Jean Cortot, Claude Viallat ou Rachid Koraïchi, qui ont réalisé avec lui des livres illustrés à tirage limité [lire page ci-contre]. L’exposition est construite autour Né à Beyrouth en 1929, à l’époque du protectorat français sur le Liban, dans une famille musulmane sunnite, Salah Stétié est plongé dans la langue française dès son plus jeune âge, selon la volonté de son père, professeur d’arabe et poète, qui le destine à une grande carrière dans l’administration. Formé par le collège protestant français de Beyrouth, puis par les Jésuites au collège SaintJoseph, il suit l’enseignement du charismatique Gabriel Bounoure à l’École supérieure des lettres de Beyrouth. Muni d’une bourse, il poursuit ses études à Paris dans les années 1950, à la Sorbonne et à l’École pratique des hautes études, où il deviendra un grand fidèle de Louis Massignon, qui lui fait redécouvrir la langue et la littérature arabes, en particulier les grands 6 – Chroniques de la BnF – n°65 « L’homme est fait de la matière de l’arc-en-ciel Il est couleur Le jaune le bleu nilotique le noir le rouge d’Amérique Le blanc, le blanc aussi, est couleur D’autres couleurs existent que je ne connais pas Qui sont à l’intérieur dans les cœurs et les âmes […] » Salah Stétié, LE BLEU DE LA QUESTION (extrait) mystiques de l’islam. Durant ses années parisiennes, intenses et fécondes, Salah Stétié noue de solides liens d’amitié avec PierreJea n Jouve, A nd ré Piey re de Mandiargues, Georges Schehadé, Ci-dessus Salah Stétié. © Stéphane Barbery.