Une coopération autour des expositions universelles
Dans le cadre d'un élargissement des axes de coopération avec les pôles associés, la BnF fait de Gallica un point d'accès vers d'autres bibliothèques numériques. L'exemple du Conservatoire numérique des Arts et Métiers (CNUM).

Classe des produits de l'exploitation des mines et de la métallurgie. Exposition universelle, 1889 © CNAM

Par une manœuvre finalement heureuse, une lectrice qui interrogeait Gallica à la recherche du texte de l'abbé Nollet Recherches sur les causes particulières des phénomènes électriques, et sur les effets nuisibles et avantageux qu'on peut en attendre fut satisfaite de le trouver en ligne. Si elle en avait bien trouvé la référence dans Gallica, l'icône CNUM, ainsi que le message "Consulter le document sur le site du Conservatoire national des Arts et Métiers" lui rappelait que ce livre faisait partie des collections numérisées du CNUM, la bibliothèque numérique du Conservatoire national des Arts et Métiers (CNAM). Une recherche lancée sur Gallica, bibliothèque numérique de la BnF, avait renvoyé cette lectrice vers les collections du CNUM.
Sans le savoir, elle avait découvert l'intérêt de la passerelle OAI, mise en place en 2006 entre les deux bibliothèques numériques. Sous ce terme technique se cache la possibilité, en interrogeant le catalogue d'une bibliothèque numérique, de trouver les documents numérisés qui la composent, et, par ricochet, grâce à un "moissonnage" des notices bibliographiques, les documents numérisés par le partenaire. Une telle navigation entre catalogues numériques suppose non seulement la mise en place de cette passerelle informatique, mais aussi la mise en cohérence, de part et d'autre, selon des standards internationaux, des données bibliographiques respectives. Pour parvenir à ce résultat,
une concertation préalable a donc eu lieu entre les équipes du CNUM et de Gallica en 2005 et 2006. Ainsi un lecteur qui cherche sur Gallica ce qui s'est publié sur les expositions universelles verra s'afficher la liste des documents appartenant tout à la fois aux collections de la BnF et du CNAM.
Le CNAM, qui possède une collection de plus de 2 000 volumes de documents imprimés – officiels ou non – sur les expositions universelles, souhaitait mettre en valeur cette collection patrimoniale, car elle montre l'implication de ses directeurs et de ses enseignants dans leurs préparations et leur déroulement. Monsieur Laussedat, directeur du CNAM de 1873 à 1900 fut, par exemple, membre du Comité d'organisation des expositions universelles. Les expositions étaient à la fois de grandes manifestations de vulgarisation et l'une des principales sources d'information sur les innovations industrielles au XIXe siècle. Tout naturellement, le Conservatoire national des arts et métiers, rattaché au ministère du Commerce et de l'Industrie jusque dans les années 1920, se trouva dépositaire de ces documents en tant que "haute école d'application des connaissances scientifiques au commerce et à l'industrie" chargée de diffuser largement l'innovation technologique.
Le CNAM a décidé de numériser les fonds consacrés aux expositions universelles en commençant par les rapports officiels des jurys internationaux qui présentaient les exposants dont les découvertes étaient récompensées par des médailles. Les domaines les plus divers des arts, des sciences et des techniques étaient représentés dans ces expositions (beaux-arts, éducation, enseignement, arts libéraux ; industries extractives, produits bruts et ouvrés ; outillage et procédés des industries mécaniques ; produits alimentaires, agriculture, aquiculture, horticulture ; économie sociale, exposition rétrospective du travail et des sciences anthropologiques...) et les innovations concernaient aussi bien les moyens de transport, les procédés généraux de la mécanique, l'hygiène, la décoration et le mobilier des édifices publics et des habitations, les procédés de colonisation ("matériel colonial" destiné aux colonies). Ces rapports des jurys internationaux sont mis en ligne sur le site du CNUM pour les expositions universelles qui eurent lieu à Paris jusqu'à 1900 inclus. Suivront les rapports des expositions universelles ultérieures et tenues à l'étranger, les textes des congrès organisés lors de ces expositions, les comptes rendus des délégations ouvrières sur les dernières innovations techniques.
Par ailleurs, le CNAM, désireux de valoriser ses ouvrages anciens les plus précieux, a entrepris la numérisation de cinq de ses "théâtres des machines" (terme générique pour les recueils des inventions du XVIe, au XVIIIe siècle avec gravures et commentaires). Ainsi sont à la disposition des internautes, parmi les 500 volumes intégralement numérisés, Le diverse et artificiose macchine d'Agostino Ramelli (1588), Les raisons des forces mouvantes, avec diverses machines tant utiles que puissantes, auxquelles sont adjoints plusieurs dessings de grotes & fontaines de Salomon de Caus (1615).
Anne-Marie Blanchenay