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– Chroniques de la BnF – n°64
Expositions
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Chefs-d’œuvre de la science des
navigateurs, ces cartes marines
enluminées sur parchemin, souvent
rehaussées d’or, ont été produites entre
le xiv
e
et le xviii
e
siècle. On les appelle
couramment « cartes portulans » ou
« portulans », par rapprochement
avec l’italien
portolano
– qui désigne
non pas une carte, mais un livre
d’instructions nautiques. Ces cartes
donnent la succession des ports et
des havres le long des côtes, tandis
que l’espace maritime compris entre
celles-ci est sillonné par des lignes
géographiques (lignes de rhumb) qui
correspondent aux directions de la
boussole. Ce système graphique per-
mettait aux marins de s’orienter et de
faire le point, en reportant sur la
carte la distance qu’ils estimaient
avoir parcourue.
Un ailleurs réel ou fantasmé
Le plus ancien portulan occidental
connu daterait de la fin du xiii
e
siècle :
c’est la fameuse « carte pisane »,
conservée au département des Cartes
et plans de la BnF.
Innovations techniques et objets
scientif iques en même temps que
témoignages de la quête d’un ailleurs
réel ou fantasmé, les « cartes portu-
lans » s’imposent aussi à notre regard
contemporain comme de véritables
œuvres d’art dont le caractère spec-
taculaire tient autant à leur taille,
souvent imposante, qu’à leur poly-
chromie et à leur univers exotique.
L’âge d’or
des cartes marines
Une partie de l’exceptionnelle collection de cartes portulans de la BnF est exposée site François-Mitterrand.
Réalisées entre le
XIV
e
et le
XVIII
e
siècle, leur beauté comme l’univers exotique qu’elles dépeignent en font de véritables
œuvres d’art, au-delà des informations qu’elles apportent sur la connaissance des mondes lointains. Un événement.
L’exposition de la BnF, à la fois
savante et didact ique, présente
quatre-vingts des plus belles cartes
portulans des collections nationales
associées à une centaine de pièces
insignes – globes, instruments astro-
nomiques, objets d’art et d’ethno-
graphie, animaux naturalisés, des-
sins, estampes et manuscrits, issus
des collections de la BnF ou prêtés
par d’autres établissements culturels
comme le musée du quai Branly, le
musée des arts asiatiques Guimet, la
British Library, le Louvre, le Service
historique de la Défense, la biblio-
thèque municipale de Lyon…
Cet événement consacre l’aboutisse-
Ci-dessus
Guillaume Le Testu
Géants de Patagonie
Cosmographie
universelle,
Le Havre, 1556,
manuscrit enluminé
sur papier.
Ci-dessous
Jacques de Vaulx,
Fabrication et usage
du nocturlabe
Premières Œuvres,
Le Havre, 1583,
manuscrit enluminé
sur vélin.
ment de deux programmes de
recherches triennaux : l’un, mené au
département des Cartes et plans,
concerne la cartographie nautique du
xiii
e
au xviii
e
siècle ; l’autre, appelé
MeDIan
et f inancé par l’Agence
nationale de la recherche, s’intéresse
aux savoirs et aux représentations
de l’océan Indien, de l’Antiquité à
l’époque moderne. Il réunit des cher-
cheurs de divers horizons : spécialistes
de l’Antiquité, historiens de l’époque
médiévale en terre d’islam et dans le
monde latin, historiens et archéolo-
gues de l’Afrique, de l’Inde et de l’Asie
du Sud-Est, et enfin, historiens de
l’aventure portugaise en Asie au
xvi
e
siècle.
Une vision «européocentrée»
du monde
Les commissaires ont interrogé sous
un angle inédit la manière dont les
Européens ont entrepris de connaître
et de se partager le monde ; mais
aussi de quel le façon les car tes
marines élaborées entre le xiv
e
et le
xviii
e
siècle, en représentant de nou-
veaux territoires et leurs peuples,
loin de donner une image objective
de la réalité géographique, sont le
reflet d’une vision « européocentrée »
du monde. Ils reviennent également
sur les conditions de navigation et le
rôle des cartes ; sur les découvertes
de l’Afr ique, de l’océan Indien,
des Amér iques et du Paci f ique.
Ils mettent en relief l’hégémonie
© Vincennes, Service historique de la Défense.