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Fils du conservateur de la biblio-
thèque et du musée Calvet à Avi-
gnon, René Girard étudie à l’École
nationale des chartes de
1943
à
1947
où il soutient sa thèse d’archiviste
paléographe sur « La vie privée à
­Avignon dans la seconde moitié du
xv
e
 siècle ». Dès
1947
il bifurque et
s’installe aux États-Unis où il effec-
tue la totalité de sa carrière univer­
sitaire. Après un doctorat d’histoire
en 
1950
à l’université d’Indiana, il
enseigne à Johns Hopkins et Buffalo,
et termine sa carrière académique à
Stanford, de
1980
à
1995
.
Une pensée transdisciplinaire
Dans son premier livre publié en
1961
,
Mensonge romantique et vérité roma-
nesque,
il expose sa théorie du désir
mimétique à partir des grandes
œuvres romanesques de la littérature
occidentale, de Cervantès à Proust.
Avec
La Violence et le sacré
(
1972
), il
élargit sa réf lexion au phénomène
­religieux archaïque en analysant le
mécanisme victimaire et sacrificiel.
En
1978
, paraît
Des choses cachées
René Girard,
penseur de la violence et du religieux
Membre de l’Académie française depuis 2005, professeur émérite en littérature comparée à l’université
de Stanford, René Girard est l’auteur de nombreux ouvrages qui ont marqué la théorie anthropologique.
Il dépose aujourd’hui ses archives au département des Manuscrits.
depuis la fondation du monde,
vaste
exposé de sa pensée sous forme
d’entre­tiens avec les psychiatres Jean-
Michel Oughourlian et Guy Lefort.
René Girard y précise, notamment,
l’importance qu’eut pour lui la lecture
des textes bibliques. En
2008
, avec
Achever Clausewitz
, série d’entretiens
avec Benoît Chantre, il propose une
réflexion sur la violence, en prolon­
gement des théories mimétiques.
Aujourd’hui docteur
honoris causa
de
plusieurs universités, René Girard a
déployé au cours des quarante der-
nières années une pensée profon­
dément transdisciplinaire qui a exercé
une grande inf luence dans les
domaines de la théorie littéraire et des
sciences humaines, tant en France
qu’à l’étranger. Le fonds qui fait son
entrée au département des Manuscrits
témoigne de la richesse de ce parcours
intellectuel. La genèse des grands
essais de René Girard est documentée
par de nombreux dossiers : fragments
préparatoires à
La Violence et le sacré
,
volumineux travail de mise au point
du texte
Des choses cachées depuis la
À gauche
René Girard
Ci-dessus
René Girard,
Le Bouc émissaire
chapitre 1
­fondation du monde
, copie préparée
pour l’impression de
La Route antique
des hommes pervers
, ensemble de notes
et de versions successives pour
S­hakespeare : les feux de l’envie
Un constant aller-retour
franco-américain
Pour
Le Bouc émissaire
, publié en
1982
, le fonds conserve une première
version dactylographiée très corrigée,
elle-même vraisembla­blement issue
de plusieurs strates antérieures, com-
plétée par la dactylographie défini-
tive, avec le découpage en chapitres.
Les conférences prononcées par René
Girard lors de colloques et de sémi-
naires internationaux constituent un
autre aspect de la diffusion de ses
idées, comme l’attestent les très nom-
breux dossiers de préparation de ses
textes, pour la période
1980
-
1990
tout particulièrement. Enf in, les
contributions de René Girard à des
revues et des ouvrages collectifs sont
représentées par un vaste ensemble
d’archives composées de dactylogra-
phies originales d’articles et de tirés à
part. Citons le « Tocqueville and
­Stendhal », paru dans
The American
Magazine of the French Legion of
Honor
, en
1960
, exemple de cet aller-
retour franco-américain continu dont
se nourrit en profondeur la pensée de
René Girard, par-delà les péripéties
de la réception de l’œuvre de ce côté-
ci de l’Atlantique.
Guillaume Fau
© Frédéric Poletti/Opale.
BnF, Manuscrits.
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– Chroniques de la BnF – n°62