International > « Le numérique reconfigure les relations de coopération internationales des bibliothèques » Après un riche parcours qui l’a conduit à participer, entre autres, à la création de la bibliothèque d’Alexandrie et à diriger la Bibliothèque publique d’information du Centre Pompidou, Gérald Grunberg dirige depuis 2008 les affaires internationales de la BnF. Entretien avec un ambassadeur passionné de la francophonie à travers le monde. Chroniques : Qu’est-ce qui a marqué l’action internationale de la BnF ces dernières années ? Gérald Grunberg : Dès 2007, Bruno Racine s’est engagé dans la CENL (Conference of European National Librarians) et dans la création de la bibliothèque numérique européenne Europeana, lancée en 2008. Grâce à la confiance de ses pairs, il a été porté à la présidence de ces deux instances en 2011. L’histoire est allée très vite : Europeana, c’est 2 200 institutions contributrices, 20 millions de documents en consultation. Actuellement, une de nos préoccupations majeures est d’augmenter la valeur ajoutée qu’elle doit démontrer, tant dans la description des contenus que dans leur organisation. Europeana doit aussi se doter d’outils multilingues qui permettront une véritable prise en compte de la diversité linguistique européenne, ce qui facilitera son utilisation dans le domaine culturel, éducatif, touristique. Enfi n, il faut assurer la pérennité financière de ce grand projet européen. Tout cela n’aurait pas été possible sans de fortes relations avec les autres et de faire rayonner. Ce qui s’est affirmé depuis quelques années, c’est une conception plus ouverte et plus vivante de la francophonie : on conçoit aujourd’hui qu’il n’y a pas un seul français mais plusieurs. Et puis, surtout, la présence du français sur la toile est un garant de diversité culturelle au côté d’autres langues moins présentes encore. La BnF s’est attachée à développer un réseau francophone numérique qui fédère les centres de documentation et les bibliothèques francophones. La question des transferts de compétences et de savoir-faire est au cœur de cette action, mais aussi la solidarité, comme avec Haïti par exemple. Il existe donc aujourd’hui un début de réseau mondial des bibliothèques numériques francophones autour, notamment, de la presse francophone présente dans de très nombreux pays. C’est un des effets positifs du numérique qui reconfigure les relations de coopération, y compris internationales ! Les institutions culturelles n’échappent pas aux effets de la crise économique ; ne risque-t-elle pas de freiner, voire de remettre en cause le développement des projets ? G. G. : Si l’on regarde de près les stratégies mises en œuvre, on se rend compte que faire des choix peut être une manière d’impulser une dynamique. Le temps est venu de réfléchir à des formes de mutualisation entre bibliothèques, par exemple en matière d’acquisition ou de conservation. Je suis convaincu que de ces contraintes nouvelles naîtront de nouvelles formes d’action et de parte nariat qui vont renforcer l’action internationale de la BnF. Propos recueillis par Sylvie Lisiecki bibliothèques nationales d’Europe. Nous avons de longue date tissé des liens étroits avec la British Library, avec la BN d’Allemagne, et avec beaucoup d’autres comme, plus récemment, celle de la Pologne. Cette politique de fortes relations bilatérales est aussi menée au niveau mondial, comme en témoigne la création du portail France-Brésil qui réunit des documents conservés dans les bibliothèques de Rio et de Paris. La BnF est aussi très impliquée dans la défense de la francophonie… G. G. : Ce mot est inscrit en lettres d’or au fronton de la Bibliothèque, premier gisement de documents francophones au monde que nous avons pour mission de partager En haut Photo David Paul Carr/BnF. Gérald Grunberg, 2009 Ci-contre La nouvelle page d’accueil d’Europeana (projet) Chroniques de la BnF – n°65 – 25