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Partager la culture avec tous
La Mission de diversification des publics accueillait en juin dernier des apprentis de l’École de la deuxième chance, pour une visite de l’exposition L’âge d’or des cartes marines et une rencontre avec l’historienne Catherine Coquery-Vidrovitch. Bilan : des échanges passionnés et une chance pour ces jeunes d’appréhender la complexité de l’Histoire.
Ouvrir les riches collections de l’institution au plus grand nombre et à un public qui ne s’autorise pas à fréquenter les lieux de culture : voici l’un des objectifs de la Mission de diversification des publics, créée en 2005 par la BnF. Ces publics recoupent une réalité très large : habitants des quartiers en difficulté, étrangers au français balbutiant ou personnes illettrées, personnes âgées isolées, chômeurs, sans logis, voire anciens détenus en réinsertion… « Notre méthode ? Écouter et agir pour accompagner au plus près les demandes de centaines d’associations, de services publics et de relais auprès desquels nous sommes engagés », précise Sylvie Dreyfus, qui pilote la Mission. Visites du bâtiment, découverte de l’histoire de la bibliothèque et de ses collections, projections de films, réalisation d’une fresque de l’histoire avec une association de banlieue, présentation de documents patrimoniaux… Les initiatives sont extrêmement variées ! Des actions suivies sont par exemple menées, en partenariat avec l’École de la deuxième chance, envers les jeunes « décrocheurs ». Cette association propose à des apprentis de 18 à 25 ans une formation d’un an, sur la base du volontariat, afin de construire un projet professionnel en retrouvant les fondamentaux en français, en mathématiques et en culture générale. « En juin dernier, nous avons proposé aux apprentis d’une école parisienne de la deuxième chance de rencontrer le commissaire de l’exposition L’âge d’or des cartes marines, poursuit Sylvie Dreyfus. Il leur a montré les pièces principales, suscitant un lot de questions souvent très pertinentes, relatives à la colonisation et l’esclavage. » L’idée est venue d’approfondir la réf lexion par un échange avec Catherine Coquer y-Vidrovitch, historienne et auteur d’une Petite Histoire de l’Afrique (La Découverte, 2010). Chercheuse émérite devenue une pédagogue « polyglotte » habituée à tous types de publics, elle leur a dressé un tableau général de l’histoire africaine, soulignant son rôle fondamental dans l’histoire mondiale, rappelant que celle-ci ne débute ni avec la colonisation ni avec l’indépendance, bref, rendant compte de sa complexité. « Il est toujours difficile, ajoute-t-elle, de faire entendre que l’esclavage a concerné toutes les sociétés anciennes. L’esclavage n’a pas été qu’une affaire entre Occidentaux esclavagistes et esclaves africains. Il a eu cours également entre Africains. Mais cela demeure méconnu. Les jeunes sont sortis de cette rencontre avec l’idée que la réalité est plus complexe qu’il n’y paraît. » Catherine Coquery-Vidrovitch devait intervenir une heure. Elle a quitté l’assemblée après trois heures d’échange. « Leur attention était remarquablement soutenue et leurs interrogations passionnées ! » Si passionnées qu’un des jeunes dont le projet était de travailler dans le domaine de l’accueil a pu effectuer un stage au service des visites de la BnF. L’apprenti a lui-même guidé d’autres visiteurs dans l’exposition, investi à son tour du rôle de médiateur. Et Sylvie Dreyfus de conclure : « En développant ce type de projet, on transforme l’image de la BnF pour la faire percevoir comme un lieu accessible à tous. »
Cédric Enjalbert
Ci-dessous
Visite de l’exposition L’âge d’or des cartes marines, juin 2012
Photographie Béatrice Lucchese/BnF.
Chroniques de la BnF – no 66 – 23